Journal REsistance SOciale n° 139
Juillet/Août 2015
Mis en ligne le 1er juillet 2015

Au sommaire ce mois-ci :

p.1 et 2 : L’édito / p.2 : Solidarité internationale (Equa-teur/Allemagne/Royaume-Uni/Espagne/Belgique) / p.3 à 5 : Place au débat (Le congrès de la CES et le syndicalisme français) / p.6 : Actualité sociale (Appel de Guéret/Hôpitaux publics : l’ « hostérité » toujours aux commandes) / p.7 : International (Grèce : un accord impossible ?) / p.8 : Coup de gueule (La « métropolisation », c’est moderne ?)

L’édito de Marinette BACHE

Au moment où j’écris cet édito les créanciers ont dit non à la Grèce. Et ce alors que chacun s’accordait à penser que nous étions près d’aboutir, Hollande et Merkel ayant même souligné que la proposition grecque était acceptable. Que veulent-ils sinon mettre à genoux ce pays et son gouvernement légitimement élu et qui, 6 mois après, jouit encore d’une forte popularité ? L’attitude des politiques, de Junker à Sapin en passant par Lagarde, est scandaleuse. Leurs propos -outre qu’ils sont méprisants et injurieux (Lagarde traitant les représentants grecs « d’enfants » ou Sapin les accusant de porter la responsabilité de la rupture)- sont significatifs de leur conception de la démocratie. Ceux qui ont bafoué la volonté du peuple français rejetant le Traité constitutionnel européen, ceux qui utilisent par 2 fois le 49-3 pour imposer une loi qui ne trouve pas de majorité à l’Assemblée nationale, se permettent de donner des leçons à Alexis Tsipras lorsqu’il décide de consulter son peuple !

L’enjeu dépasse la Grèce elle-même. Il s’agit de savoir si, face aux nouveaux maîtres de la finance mondiale, les peuples ont encore leur mot à dire ou s’ils doivent s’attendre à être définitivement réduits au rôle d’esclaves modernes. De l’issue de cette crise, c’est l’ensemble des salariés dans le monde, et particulièrement en Europe, qui seront ga-gnants ou perdants. C’est pourquoi il faut non seulement saluer le courage du peuple grec, mais aussi lui apporter tout notre soutien, ainsi que l’ont fait de nombreuses manifestations à travers le monde et qui se poursuivent dans la perspective du référendum du 5 juillet. On aimerait que le gouvernement français, élu à gauche, agisse clairement en ce sens.

Mais l’actualité amène à se poser la question : Qu’y-a-t-il de gauche dans la loi Macron qui vient d’être adoptée grâce à une 2ème utilisation du 49-3 ? Qu’y-a-t-il de gauche dans les nouvelles mesures annoncées par Valls concernant les PME qui permettront à un patron d’imposer un 2ème CDD à un salarié, le précarisant un peu plus ? Qu’y-a-t-il de gauche dans la décision de plafonner les indemnités de licenciement alors que dans le même temps on laisse les dirigeants des entreprises s’octroyer des retraites dorées et les actionnaires continuer à se gaver ? Qu’y-a-t-il de gauche dans cette loi sur le renseignement qui prétend restreindre les libertés publiques au nom de la lutte contre le terrorisme ? Loi qui pourrait très bien demain être utilisée contre les salariés et leurs organisations syndicales ou politiques, même sans l’arrivée au pouvoir du FN. (...)

Et, pendant ce temps-là, le peuple continue de bouder les urnes, faisant un à un tomber ces bastions de la gauche jugés imprenables il y a encore peu de temps. Plus aucune municipalité socialiste dans les Hauts-de-Seine après les élections municipales partielles du 21 juin. Mais Bruno Le Roux, le très autiste président du groupe socialiste à l’Assemblée Nationale, ne perçoit aucun rejet de la population. Tout comme Hollande qui semble chaque jour un peu plus prêt à se lancer dans une nouvelle campagne présidentielle.

Pourtant le chômage ne baisse pas, il n’a même jamais été aussi haut : plus de 3,5 M de chômeurs recensés ! On nous affirme que la croissance repart mais chacun sait qu’elle est surtout due à des fac-teurs extérieurs comme la baisse du prix du pétrole ou la parité de l’euro par rapport au dollar. Quant à la dette, loin de diminuer, elle explose. Mais le gouvernement continue de verser à tour de bras des aides aux entreprises et à rogner les crédits aux collectivités locales, mettant en danger la culture, les associations ou les services publics. Services publics pour lesquels partis politiques, syndicats et associations se sont mobilisés les 13 et 14 juin à Guéret autour de la Convergence de Défense et de Développement des Services Publics (cf Appel en page 6).

Dans ce contexte on aurait pu attendre du congrès du Parti Socialiste qu’il s’interroge vraiment sur la politique gouvernementale et propose un autre chemin pour éviter à la gauche de se fracasser contre le mur en 2017. Hélas, malgré le score non négligeable de la motion des frondeurs, force est de constater que le congrès de Poitiers a accouché d’une souris. Malgré l’engagement d’agir pour une réorientation de la politique économique contenu dans la motion majoritaire, c’est la même politique qui s’applique avant et après. Pire même, elle est aggravée ! Plus que jamais un travail en commun de celles et ceux qui militent pour une autre politique, conforme aux aspirations du peuple est nécessaire. Résistance Sociale est prête à y prendre sa part.