Journal REsistance SOciale n° 123
Février 2014
Mis en ligne le 26 février 2014

Au sommaire ce mois-ci :

p.1 et 2 : L’édito / p.2 : Solidarité internationale / p.3 à 5 : Place au débat (Le « Pacte de responsabilité » made in troïka) / p.6 et 7 : Actualité sociale (Soutien et fraternité avec les enseignants en lutte en Algérie / Mensonge sur la baisse des allocations chômage / Compte rendu du Collectif 59 contre la signature du traité transatlantique) / p.7 : Les bras m’en tombent (Dentistes : « Une grève qui m’interroge… ») / p.8 : Coup de gueule (Non, Monsieur Gattaz, le stress n’est pas que pour les salariés !)

L’édito de Marinette Bache

Je ne suis pas sûre que notre pays ait connu pire situation depuis 50 ans. Oh, bien sûr, ce n’est pas du seul fait de l’actuel gouvernement. 10 ans de gouvernement de droite dont cinq ans de sarkozysme ont été une catastrophe sociale : RGPP, casse de l’école publique, fermetures d’hôpitaux publics, priva-tisation de la Poste, d’EdF, de GdF, attaques contre le Code du travail, délocalisations, démantèlement de la Sécurité sociale…

Voici bientôt 2 ans que les Français ont porté François Hollande à la Présidence, en lui donnant une majorité à l’Assemblée nationale, sans doute sans croire vraiment au discours prononcé le 22 janvier 2012 au Bourget, mais, au moins, pour stopper cette politique.

Alors, quel est le bilan 20 mois après ? Le sentiment –fondé sur les faits, sur la réalité des décisions, et ce n’est pas les avancées sociétales qui y changeront quelque chose– est que la même politique conti-nue.

De la remise en cause de la retraite à 60 ans, à la Sécurité sociale ramenée à un simple « welfare » à l’américaine en passant par l’ANI et la stagnation du pouvoir d’achat (pour ne pas dire pire), pour en arriver au « pacte de responsabilité », la politique de Hollande / Ayrault semble avoir pour seul objectif de faire plaisir au MEDEF contre, soi-disant, un engagement à lutter contre le chômage.

Un engagement qui n’a pas de sens. La « politique de l’offre » n’est pas nouvelle. Elle ne consiste en rien d’autre qu’à baisser les revenus. Elle est censée, en réduisant ainsi les coûts, permettre de pro-duire moins cher donc de susciter la demande. Le problème c’est qu’elle n’aboutit pas à une baisse des prix sur le plan intérieur tandis que la politique d’austérité conduit bien, elle, à une baisse du pouvoir d’achat. Elle a toujours échoué. Enfin, « échoué » si on considère que le but est bien l’augmentation du niveau de vie et de bien-être du plus grand nombre. Et concernant ce gouvernement, on commence sérieusement à se poser la question !

Un engagement qui engage qui ? Les salariés ? On ne le leur a jamais demandé leur avis. Ils savent seulement que ce sont eux qui devront payer, baisser leur revenu (jusqu’à toucher aux avancements des fonctionnaires ?), baisser –encore- leur protection sociale et leurs droits sociaux. Les patrons ? La réponse de Gattaz a le mérite d’être claire. Qu’il fasse partie de l’escapade étatsunienne de Hollande n’y a rien changé : aucun engagement contre les près de 100 milliards de cadeaux aux entreprises. (...)

François Hollande, en janvier 2012, prétendait vouloir s’affronter à la finance. Mais qu’attend-il pour chercher plutôt une solution de ce côté-là ? Il y a bien longtemps que nos « patrons » ne sont plus des entrepreneurs mais des financiers, qu’ils savent que la production rapporte bien moins que le placement dans les paradis fiscaux ! Et on leur demande gentiment -et on les paie même pour cela !- d’embaucher c’est à dire de produire plus, alors qu’ils veulent seulement plus de dividendes !

De toutes façons, les entreprises n’embauchent pas pour le plaisir mais pour répondre à une demande. Comment cette demande pourrait-elle exister quand les salariés n’ont pas de quoi acheter ? La « poli-tique de l’offre » c’est l’autre nom d’une politique de récession. On s’étonne de la « bêtise » de François Hollande, de ses ministres et de ses conseillers économiques quand on voit qu’aux Etats-Unis Barak Obama vient de décider d’augmenter le salaire minimum de 40%. 40% ! Obama n’est pourtant pas un dangereux collectiviste !

Alors ? « Bêtise » ou choix politique ? La question se pose sans ambages. Au sein du Parti socialiste, lui-même, de nombreux adhérents, élus et responsables l’affirment : une autre politique est possible. Ces militants ne croient pas (ou plus) que la suppression des cotisations familiales, la baisse du coût du travail ou la réduction drastique des dépenses publiques, sont la solution pour sortir notre pays d’une crise socio-économique qui rapporte au patronat en plongeant notre pays dans la récession. Ils ne le croient pas et, fait nouveau, ils le disent publiquement.

C’est une raison d’espérer.

Et il serait temps de pouvoir le faire. Les manifestations du type « jour de colère » ou « manif pour tous » nous rappellent que l’extrême droite la plus haineuse peut retrouver un souffle sur fond de mi-sère populaire. Ce ne sont pas des réponses moralisantes que notre peuple attend ; c’est une réorientation totale de la politique gouvernementale.