Dégel du point d’indice des fonctionnaires : une revalorisation en trompe l’oeil
Par Pierre KERDRAON - Journal RESO n° 216 - Juillet-août 2022
Mis en ligne le 12 juillet 2022

Après 10 ans de gel, le gouvernement vient enfin de décider d’une revalorisation du point d’indice des fonctionnaires. On pourrait s’en réjouir. Sauf que cette augmentation n’est que de 3,5 % soit en dessous du niveau de l’inflation (au moins de + 5 % et sans doute encore davantage d’ici la fin de l’année). Résultat : les fonctionnaires vont encore perdre du pouvoir d’achat. Pour rappel les fonctionnaires ont déjà perdu 17,4 % de pouvoir d’achat depuis 2010 et 44 % depuis 1981 !

Après ça comment s’étonner que les postes mis au concours qu’il s’agisse de la santé ou de l’éducation par exemple ne trouve pas preneurs ?

Ainsi de nombreux postes d’enseignants n’ont pu être pourvus cette année. Comment en irait-il autrement alors qu’avec avec au minimum un bac+5, les titulaires du CAPES ne gagnent que 5% au-dessus du SMIC… Ainsi il n’y a eu que 557 admis au CAPES de maths, alors qu’il y avait au départ un peu plus de 1000 postes mis au concours. Et, compte-tenu de l’inflation, et bien que le point d‘indice vienne d’augmenter, un certifié débutant en septembre 2022 aura un revenu en euros constants inférieur d’environ 2% à un certifié débutant en septembre 2021 ! S’agissant du CAPES remarquons l’introduction d’une épreuve de « républicanisme ». Avoir des enseignants pleinement républicains qui s’en plaindrait ? Encore faut-il pour cela que les enseignants sachent vraiment ce qu’on attend d’eux et leur donner des instructions claires et surtout, surtout, les soutenir quand ils rencontrent des problèmes. Ce qui n’est pas du tout le cas actuellement de l’administration de l’Education nationale. Avoir le courage d’un Samuel Paty ça ne s’improvise pas.

De fait la question du salaire chez les fonctionnaires et plus généralement chez les agents dotés d’un statut renvoie plus généralement au mépris dont ils sont l’objet de la part d’un certain nombre de politiques.

Chacun est pourtant bien content quand son gamin décroche le baccalauréat ou que les agents d’EDF réparent les dégâts causés par les intempéries.

L’un des objectifs de Macron à travers sa réforme des retraites c’est de se débarrasser des statuts spéciaux qui permettent notamment à certains salariés de partir plus tôt en retraite. Sauf que, on le voit à la SNCF par exemple, les cheminots privés de l’espoir d’une retraite anticipée, contrepartie de salaires plus bas et d’horaires parfois atypiques, préfèrent quitter l’entreprise pour chercher un travail plus rémunérateur et moins contraignant dans le privé.

Il n’y a pas de miracle : si on veut une école qui fonctionne, des urgences hospitalières capables de recevoir tous les malades qui en ont besoin, alors il faut y mettre le prix. Des salaires décents, une vraie reconnaissance du rôle qu’ils jouent dans la société et il sera possible de répondre aux besoins de la collectivité.