Renault Sandouville : de quoi est-il question ?
Journal RESO n° 192 - Mai 2020
Mis en ligne le 31 mai 2020

L’article ci-dessous concerne la décision de justice qui a empêché Renault de rouvrir son usine de Sandouville sans les mesures sanitaires nécessaires à la protection des ouvriers. Au moment où les chaines de TV nous rebattent les oreilles sur le port du masque et les gestes barrières, la direction de Renault… et Laurent Berger faisaient peu de cas de la santé des salariés. Aujourd’hui, Renault est confronté à un autre problème : pour mauvaise gestion de ses PDG successifs, plus préoccupés de rentabilité immédiate qui les a fait rechercher une main d’œuvre à bas coût dans les pays du 1/3 monde au détriment de l’innovation technologique, Renault se débat dans d’énormes difficultés financières. Qu’il veut régler de sa manière habituelle, c’est-à-dire en fermant 4 sites de production sur le sol français !

Renault Sandouville, de quoi est-il question ?

Les réactions virulentes contre la décision de justice qui empêche Renault de rouvrir son usine de Sandouville inter-pellent à plus d’un titre. Il s’agit d’abord de l’intervention sans nuance de Laurent Berger. Ce dernier utilise la décision du juge saisi par la CGT pour taper sur cette dernière. Certains penseront que c’est de bonne guerre pour rappeler les divergences qui existent entre les deux centrales. À ceci près que le syndicalisme dit de négociation en proximité est là aussi pris en défaut. Ce qui est condamné par la justice c’est le fait que le CSE (Comité Social et Économique) de Renault Sandouville n’a pas été consulté !

Respecter le droit à la consultation des représentants du personnel Tout syndicaliste comprend bien en cette période la nécessité d’un dialogue entre représentants du personnel et employeur. Un tel dialogue ne peut se limiter à une simple information pour l’employeur. Ce dernier doit communiquer l’ensemble des éléments nécessaires aux représentants du personnel. Ce qui n’a pas été le cas. Et la consultation préalable du CSE doit porter sur les équipements de protection individuelle, la formation des salariés. Les interventions des sous-traitants sur le site doivent faire l’objet d’un plan de prévention.

Syndicaliste ? ou plutôt ministre ? C’est cet ensemble d’obligations que rappelle le juge. On ne trouve guère de trace de ces questions ni dans l’intervention de Laurent Berger, ni dans les commentaires de presse nombreux qui ont suivi. Pour le simple citoyen qui ne le connaît pas, Laurent Berger pourrait passer ici comme un ministre de Macron-Philippe.

On est donc loin d’une simple discussion sur les stratégies syndicales supposées des uns et des autres. Il s’agit du respect a minima des règles du dialogue social en entreprise qui ne cesse d’être réduit par les employeurs et les ordonnances prises par le pouvoir ces dernières années. Sans doute, pour mieux comprendre, faut-il se reporter à la déclaration commune entre le Medef, la CFDT et la CFTC rendue publique la veille du 1er mai (1) qui affirme que « la vie économique et sociale doit être progressivement restaurée ». Certes il est précisé que ceci doit se faire « dans des conditions de sécurité optimales pour les salariés ».

S’appuyer sur la décision du Havre La seconde partie de la phrase devrait conduire à négocier et donc à applaudir le jugement du Havre. Tous ceux qui font l’inverse sont dans une démarche de reprise à tout prix et pas dans une démarche de reprise négociée avec les protections et conditions sanitaires. Tous les syndicalistes, quelles que soient leur étiquettes, ne peuvent que se réjouir de cette décision de justice (2) comme de celle qui concernait Amazon il y a quelques semaines.


(1) https://www.medef.com/fr/communique-de-presse/article/declaration-commune-cfdt-cftc-medef-pour-le-maintien-ou-la-reprise-des-activites-economiques-dans-des-conditions-sanitaires-optimales

(2) Décision consultable ici : RENAULT SANDOUVILLE doit suspendre aujourd’hui sa reprise d’activité - Association Henri Pézerat