Les statisticiens dans les rues de Paris contre une délocalisation à Metz
Mis en ligne le 22 octobre 2008
Les agents de la statistique publique (Insee, Dares, etc) ont manifesté et fait grève le 21 octobre dans toute la France, pour protester contre un projet de délocalisation à Metz qui menace selon eux la qualité de leurs travaux, et leur fait craindre un "démantèlement".

Ils protestaient contre la décision du président Sarkozy de délocaliser à l’horizon 2011 un millier d’agents de la statistique publique dans cette ville de Moselle, pour compenser la fermeture de casernes et le départ des militaires et de leurs familles.

Les salariés ont défilé aux cris de "Les chiffres du chômage, le niveau des prix, et hop tout ça, à la poubelle !". Ils portaient des affiches sur lesquelles on pouvait lire "La Metz n’est pas dite" ou encore "Statistiques en caserne, les chiffres au pas".

Au total, la statistique publique compte 8.300 agents en France, dont environ 6.000 à l’Insee. L’Institut économique compte plusieurs directions régionales. 1.500 de ses agents sont basés à Paris. En régions, des défilés ont eu lieuà Toulouse, Nantes et Rennes. D’autres actions ont eu lieu à Lille, Caen, Clermont-Ferrand ou Lyon. Le directeur de l’Insee, Jean-Philippe Cotis, doit rendre "avant le 30 novembre" au gouvernement un rapport tentant de définir "les contours" d’un pôle statistique à Metz, "qui préserve au mieux les intérêts de la statistique publique".

"C’est une décision arbitraire pour compenser une autre décision arbitraire. On nous prend pour des bouche-trous", a réagi dans le cortège parisien Julie Herviant, porte-parole de l’intersyndicale. Selon elle, une délocalisation "privera les statisticiens de nombreux contacts professionnels extérieurs nécessaires pour la connaissance des dossiers".

Les syndicats font valoir que les deux tiers des statisticiens sont déjà en province. Mais ceux qui travaillent à Paris ont besoin d’être proches de fournisseurs de chiffres comme l’ANPE, l’Unedic, les caisses d’assurance maladie ou associations. Ils sont aussi en contacts physiques réguliers avec des demandeurs de statistiques et d’analyses au sein des ministères, des institutions et organismes exploiteurs de données, et enfin des médias nationaux.

Ils disent avoir besoin de rencontrer leurs interlocuteurs, et "pas par internet ou téléphone", a expliqué un manifestant. Un avis partagé par l’économiste Eric Maurin, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), pour qui "cette délocalisation risque d’handicaper les travaux de tous les chercheurs basés à Paris, qui essaient d’appuyer leurs analyses sur les sources les plus fiables possibles". Au final, c’est la statistique publique elle-même "que le gouvernement prend le risque d’affaiblir", a-t-il déclaré. Une pétition "sauvonslastatistique.org" a recueilli plus de 13.000 signatures.