Femmes et retraites
Par Christiane Marty
Mis en ligne le 26 avril 2010
Une politique développant des modes de garde aura un impact à la fois sur le taux d’emploi des femmes et donc le nombre de cotisantes, et probablement sur le taux de fécondité.

Dans son rapport de 2001, le COR insistait sur le fait que « Les taux d’activité et d’emploi ont une influence forte sur l’équilibre des régimes de retraite ». Il notait l’influence des « taux d’activité de catégories particulières de la population, dont les évolutions ne sont pas simples à appréhender et qui pourraient être notables : les jeunes, les femmes et les salariés âgés » et pointait qu’il y avait là des marges de manoeuvre. Depuis, il focalise sur le seul taux d’emploi des seniors, suivant en cela les préconisations de la stratégie européenne de l’emploi et de l’OCDE…

... L’allongement de l’activité des seniors, outre qu’il n’est souhaité ni par les concernés, souvent usés par les conditions de travail, ni par les entreprises qui s’en débarrassent, ne favorise pas la place faite aux jeunes. Les jeunes et les femmes souhaitent avoir un emploi6. La plupart des seniors, non, et les entreprises ne veulent pas d’eux non plus. Au lieu de s’obstiner à vouloir faire travailler les seniors, l’avenir n’est-il pas de permettre le travail des jeunes et des femmes ?

... Le bon ratio est le ratio de dépendance économique, défini par le nombre total de personnes sans emploi rapporté à celui des personnes en emploi. Calculé avec les hypothèses retenues par le COR, ce ratio passerait de 1,37 en 2010 à 1,55 en 2050, soit une modeste augmentation de 13%. De plus, lorsqu’on fait le calcul avec l’hypothèse d’alignement du taux d’emploi des femmes sur celui des hommes, on obtient un ratio de dépendance économique de 1,31 en 2030 (en baisse donc), et de 1,38 en 2050 : on rejoindrait alors la valeur de 2010 (1,37). Ce qui signifie qu’il n’y aurait dans les années futures aucune détérioration de la « charge pesant sur les actifs » par rapport à la situation de 2010.

... A titre indicatif, on peut remarquer que les inégalités de salaire entre les hommes et les femmes représentent a minima 10% de la masse salariale, c’est à dire, même si cela ne correspond pas tout à fait, un déficit d’environ 10% du montant des cotisations… soit l’équivalent d’un manque de 25 milliards d’euros de cotisations en 2008.

... Proposition : Majoration du taux de cotisation des employeurs qui imposent le temps partiel, par exemple cotisation sur une base de temps plein. Le travail à temps partiel est très défavorable aux salariées (salaire, carrière professionnelle, retraite) et très favorable aux employeurs (la productivité horaire d’un emploi à temps partiel est supérieure à celle du temps complet). Là encore, il est légitime de majorer le taux de cotisation pour ces emplois, pour valider ces périodes comme des temps pleins pour les salarié-es.

... Une étude récente d’experts [européens] « montre que l’élimination des disparités entre les femmes et les hommes dans le domaine de l’emploi pourrait entraîner une croissance du PIB de l’ordre de 15 à 45 % » selon les pays. Pour la France, cette croissance est évaluée à 20 %. En supposant que l’égalité serait réalisée en 2030, la part des cotisations de retraites dans le PIB étant de 13 % (probablement plus en 2030), une croissance de 20 % du PIB représenterait en 2030 un apport de cotisation minimal de 78 milliards d’euros par an9. Cet apport serait pérenne si la dynamique de l’égalité ne se dément pas. Ce montant est à comparer au besoin de financement des retraites évalué (COR, avril 2010) entre 56,3 et 79,9 milliards à l’horizon 2030…

Christiane Marty