Hôpitaux, la réforme qui menace la qualité des soins
Communiqué de Nicole SMOLSKI, Présidente du Syndicat National des Praticiens Hospitaliers en Anesthésie Réanimation Elargi.
Mis en ligne le 22 mars 2010
Les mécontentements ne cessent de s’exprimer et de grandir de toute part dans nos hôpitaux. L’actualité à Paris et ailleurs s’en fait chaque jour l’écho. La loi HPST a placé au sommet de tous les établissements de santé un directeur aux pouvoirs absolus. Sa mission : amener les hôpitaux à des critères de rentabilité. Nos managers se tournent vers de nouveaux modes d’organisation du travail avec une seul objectif , la réduction des coûts. Mais à quel prix ?

Le seul modèle est celui de l’entreprise et de la concurrence. Alors que nous vivons une crise financière sans précédent, la fuite en avant vers un modèle néo libéral loin du modèle de protection sociale, fondement de notre civilisation, se poursuit.

Pire, l’hôpital depuis quelques mois est le nouveau terrain d’expérimentations dangereuses, malgré les avertissements grandissants. Le taylorisme est expérimenté dans nos hôpitaux publics, confinant les soignants au rôle d’ouvriers spécialisés. La spécificité de nos métiers, basée sur autonomie et indépendance de jugement pour une décision médicale juste et efficace, est niée. La médecine ne devient qu’une simple exécution automatique et répétitive d’actes de soins standardisés et validés par les Agences d’Etat. Nous voulons leur dire que la médecine est affaire d’humanité.

D’autres managers découvrent des méthodes de management plus exotiques, telles que le « Lean management » (management dégraissé ou sans gras) développé par la firme Toyota dans les années 70-80 puis théorisé aux Etats-Unis plus récemment : une nouvelle théorie de la performance. Mais au nom de quoi osent-ils importer des méthodes de gestion d’entreprise qui ont montré leurs limites, à commencer par Toyota comme l’actualité récente l’a montré : pourrons-nous rappeler nos patients comme de vulgaires voitures ?

Le SNPHAR-E veut prendre l’opinion à témoin. Nous ne voulons pas de ces modèles source de souffrance au travail et porteurs de danger quant à la qualité des soins délivrés.

L’absence de contre-pouvoir à l’hôpital institutionnalisé par la Loi HPST ouvre le champ à toutes ces dérives gestionnaires. Les nouveaux décrets proposés pour les CME le prouvent : tout est fait pour écarter les acteurs de soins, et notamment les praticiens hospitaliers, des décisions. Le SNPHAR soutient totalement les 4 Intersyndicales qui s’opposent à cette parodie de concertation.

Beaucoup d’entre nous consacrons notre vie au soin et à l’hôpital. Nous n’acceptons pas que des hommes de passage, des néo managers hospitaliers, détruisent des vocations et un collectif de soin au profit d’une idéologie et d’une carrière. La qualité des soins et la santé des soignants sont aujourd’hui gravement menacés.

Nicole SMOLSKI