Vices de la finance, vertu de l’industrie...
Par Rémi AUFRERE-PRIVEL Syndicaliste, Rédacteur en chef Honoraire "Défense et Citoyen"
Mis en ligne le 1er avril 2019

La financiarisation de l’économie française s’est trouvée un moteur à très grande vitesse avec l’élection du Président Macron. Je n’ai pas été surpris par cette politique portée par un homme qui était prédestiné à cette action. Dans ses formations initiales, universitaires, dans son entregent, dans sa capacité à flatter les grands du pays ("grands banquiers" et "grands politiques traditionnels"), dans sa totale absence d’empathie par rapport au citoyen commun, non décidément je ne m’attendais à rien de progressiste.

Bien sûr, je me souviens quand même avec un peu de satisfaction des deux ministres qui ont parlé, je crois, avec sincérité de l’industrialisation de notre pays, Arnaud MONTEBOURG et Christophe SIRUGUE, avec leurs qualités et leurs défauts.

"Industrialisation" le mot est dit. Pour moi, il est beau, il est grand et il est fort. Parce que femmes et hommes de progrès, nous ne pouvons-nous résigner à voir la France sombrer dans le seul avenir du tourisme et de la finance (en récupérant avec une délectation malsaine quelques centaines ou milliers d’emplois fuyant le Royaume-Uni pour cause de Brexit). Cela prouve encore (et toujours) que la finance n’a ni patrie et...ni éthique. Et qu’elle reste notre..."adversaire"...selon les propos du candidat F.HOLLANDE.

Je ne veux pas d’un pays qui se résume à une capacité hôtelière et l’à attractivité de sa superbe géographie et sa "douceur de vivre" pour ses visiteurs étrangers. Je ne veux pas d’une nation de rentiers, ni d’actionnaires de sa propre souffrance ou plutôt de son propre masochisme consistant à supprimer massivement des emplois (et le sien) pour obtenir des dividendes au-delà du raisonnable.

Je refuse que la France et l’Europe soit un exemple de vertu pour concrétiser le principe du libre-échange mondialisé.

Il est quand même incroyable que les plus grandes nations économiques (et politiques) que sont les USA, la Chine, le Japon sont les pays qui possèdent le plus de barrières protectionnistes. Songez par exemple qu’il est interdit pour une entreprise construisant des matériels roulants pour le transport public de remporter un appel d’offre aux Etats-Unis (pour un marché de + de 100 000 US dollars) si la production n’est pas réalisée... aux Etats-Unis.

N’ayons pas la mémoire courte. Le rachat de la branche énergie d’Alstom par Général Electric par des appuis politiques et de la justice américaine au service des intérêts économiques et financiers étasuniens a parfaitement joué son rôle pour maintenir et développer les emplois outre-Atlantique. Il est quand même stupéfiant de s’interdire l’alliance (certes imparfaite dans les conditions actuelles) entre Alstom et Siemens. L’Union Européenne veut montrer qu’elle est vertueuse en matière de concurrence libre et non faussée. Mais en faisant ainsi, elle ne sert pas l’industrialisation, l’emploi et la vraie dynamique productive et saine pour faire de l’Europe, une Europe puissance.

Il y a le "USA Business act" protecteur pour l’industrie américaine, il nous faut l’European Business Act !

Il n’existe pas de grande puissance sans force armée commune, et sans politique industrielle ambitieuse. Sur ces deux plans, l’Europe est nue. Et il est urgent d’agir !