Le PLFSS 2019 Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale
par Jean-Claude Chailley
Mis en ligne le 30 novembre 2018

Procédure accélérée au Parlement. Le budget est de plus de 500 milliards. Dans une véritable démocratie le gouvernement organiserait un débat public. Honteux de sa politique, il veut le moins d’information possible, le moins de débat possible, y compris au Parlement.
Il faut au contraire alerter la population : la Sécu concerne tout le monde « de la naissance à la mort » et elle est en danger !

 

Remarques :

On ne parle plus de « trou » de la Sécu. La Sécu est équilibrée et même excédentaire. Est-ce une bonne nouvelle ?
- On pourrait se féliciter du retour à l’équilibre si les différentes branches de la Sécurité Sociale répondaient aux besoins conformément à ses principes fondateurs « chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ».

- Or c’est le contraire qui se produit :
Les déserts médicaux s’étendent, l’accès aux soins est de plus en plus difficile, 30 % renoncent à certains soins, les hôpitaux et les maternités ferment ou sont restructurés en permanence, le manque de budget et de personnel dans les hôpitaux, dans les EHPAD entraîne une maltraitance institutionnelle…
- Les prestations familiales, les retraites ne sont revalorisées que de 0,3 % en 2019 et 2020, bien au-dessous de l’inflation.
- Pire encore pour l’Agirc et l’Arrco (80 % des retraité-e-s ) pas revalorisées du tout.
L’équilibre est donc atteint par sous-financement par rapport aux besoins.

- Ce qu’on appelle « Administrations de Sécurité Sociale » (*) doit dégager 14 milliards de profit en 2018 et 20 milliards en 2019.
Honte : ils seront utilisés pour rembourser la dette créée volontairement par les gouvernements au lieu de satisfaire les besoins !

(*) En gros la protection sociale, une des composantes du budget de la France avec l’Etat et les collectivités locales. C’est la Sécu + l’Unedic, + les retraites complémentaires…
- La Sécurité Sociale est excédentaire dans un projet « assumé » de destruction de la Sécurité Sociale d’Ambroise Croizat :


Agnès Buzyn disciple de Kessler :
Santé : « un système de santé à bout de souffle, pensé à la sortie de la Seconde Guerre mondiale et qui répondait aux enjeux de santé publique de l’époque ».
Retraites : « ce ne sera pas une énième réforme des retraites… Ce n’est pas un problème technique, c’est un projet de société ». Exact, ils ont un projet de société 100 % libéral.


Origine du sous financement ?
- Les exonérations et exemptions de cotisations sociales sont de 45 milliards en 2018. Elles atteindront 65 milliards en 2019. 65 milliards, c’est 3 points de PIB, c’est 65 milliards de plus sur la dette. Qui peut contester que le gouvernement crée les déficits et la dette volontairement ?
- Et en plus 10 milliards ne sont pas compensés à la Sécurité Sociale alors qu’ils devraient l’être.
- Nous dénonçons également la suppression de cotisations sociales salariales sur les heures supplémentaires, reprise de Sarkozy car elles manquent à la Sécu. Elles sont compensées par les taxes (dont les carburants) et l’augmentation des tarifs des complémentaires ;
Elles sont facteur de chômage ;
Ce sont les salaires qu’il faut augmenter, ils financent la Sécu.
- Gérard Darmanin instaure le principe de non compensation à la Sécu, vers la fusion des budgets Sécu – Etat, qui acterait la mort de la Sécu.
- Pour augmenter les excédents, il y aura 5,7 milliards de coupes supplémentaires en 2019, dont 3,8 milliards sur l’assurance maladie et 1,8 milliards sur les retraites et les prestations familiales.

Qui paie ce sous-financement ?
Macron : « Le système de protection sociale doit être moins financé par des cotisations sociales assises sur le travail, et plus par l’impôt ". Lequel ? "L’impôt qui repose sur la consommation, sur la pollution, …".
Les cotisations sociales ne représentent plus que 51 % du financement du régime général. La compensation se fait par la TVA, la CSG, les multiples taxes, dont la « pollution ».
- C’est la destruction qui s’accélère de la Sécurité Social car elle est fondée sur la cotisation.
- Le fardeau est reporté sur la population dont le pouvoir d’achat est de plus en plus impacté.
- L’offensive contre le salaire est une offensive contre la Sécu et réciproquement.
- Les exonérations frappent aussi les retraites complémentaires et l’Unedic qui doit faire plus de 3 milliards d’économies en 3 ans.


La taxe sur le diesel, sur l’essence… et la démagogie

Cette taxe rapporte 37 milliards. C’est un des outils pour compenser les exonérations de cotisations « patronales ». Les patrons, les partis de droite et d’extrême droite, certains partis de gauche, qui dénoncent l’augmentation font de la démagogie, car cette politique c’est la leur !

Résistance Sociale s’attaque à la cause : nous avons toujours demandé la suppression des exonérations de cotisations sociales, alors qu’ils les ont tous augmentées chaque année.


Existence du SMIC : danger
Il ne reste plus de cotisations au niveau du SMIC, mais il est toujours jugé trop élevé.
Maintenant, c’est l’existence du SMIC qui est dans le collimateur (remplacement du SMIC par le revenu minimum comportant une part d’impôt / taxe ).

Qui profite de ce sous-financement ?
Les spéculateurs, les actionnaires français et étrangers (100 milliards de dividendes en 2018). Pour le MEDEF, il est plus efficace d’exiger toujours plus d’assistance de gouvernements de droite et / ou de « gauche » que de conquérir ou même de conserver des marchés.
Les exonérations et aides tous azimuts ne se traduisent ni en investissements, ni en compétitivité. La France s’est désindustrialisée, la balance commerciale est déficitaire, le chômage monte depuis des années.

L’ONDAM (Objectif National de Dépenses d’Assurance maladie)

 

L’ONDAM qui augmente de 2,5 % est un des pires jamais vus si on tient compte de l’inflation.
Il est très insuffisant, compte tenu de l’accumulation des manques, du vieillissement, de l’augmentation de la population.

- Ce sont encore 3,8 milliards de coupes budgétaires. Il faudrait un ONDAM à 4,5 % - 5 %, ne serait-ce que pour maintenir l’existant.
- Nous avons vu qu’il y a 65 milliards d’exonérations dont 10 milliards non compensés, qu’il y a 20 milliards d’excédents. Personne ne peut nier que dégager 4 ou 5 milliards ne pose aucun problème, d’autant qu’il existe d’autres sources de financement. C’est uniquement une question de volonté politique.
- La France était 14ème de l’OCDE en dépenses de santé par habitant en 2015. Nul doute qu’on va sombrer encore plus loin !
- Pour Mme Buzyn et son plan de santé, il y a « 30 % d’actes non pertinents », 15 % des arrêts de travail sont des abus ». D’où sa réforme :

- Les hôpitaux sont mis pratiquement tous en déficit pour imposer des fermetures et restructurations.
C’est notamment le cas de l’AP – HP, 1er CGU d’Europe, pour lequel Buzyn – Hirsch veulent imposer un démantèlement appelé « nouvelle AP ».
Les fermetures incessantes d’hôpitaux et maternités partout en France suscitent des mobilisations de masse : Le Blanc, Vierzon… 
- Nouveau : financer l’hôpital pour RENVOYER LES PATIENTS !
Pour rétablir les équilibres et désengorger les urgences, le gouvernement finance l’hôpital pour renvoyer les patients vers un hypothétique rendez-vous chez un médecin !
-  Rationner les soins, notamment des maladies chroniques qui représentent 60 % des coûts.
Il s’agit de créer un forfait soins dans le cadre de budgets insuffisants. Nul doute que ça se traduira par un rationnement des soins.
Le forfait, c’est aussi la création de réseaux de soins copiés des USA, pour développer le privé lucratif.
- Lunettes, aides auditives, soins dentaires : vive le privé !
Au lieu de les faire rembourser par la Sécu, le gouvernement les confie aux complémentaires qui vont évidemment augmenter leurs tarifs puisqu’ils sont libres.
- Dépendance : la Mutualité française ne s’y trompe pas : après les lunettes, elle demande d’obliger à s’assurer contre la dépendance, en opposition frontale à la Sécurité Sociale.
- Pour notre part, nous sommes pour aller vers le remboursement de la prévention et de tous les soins à 100 % par la Sécu, y compris la perte d’autonomie, quel que soit l’âge.

RETRAITES
- Le budget devient excédentaire… par la baisse des pensions, notamment une revalorisation de seulement 0,3 % après l’augmentation de la CSG, l’ajout d’une taxe autonomie de 0,3 % …
La colère des 17 millions de retraités est grande, d’autant qu’en 2020 il est prévu de nouveau une revalorisation de 0,3 % bien inférieure à l’inflation !
- Les concertations sur la réforme à points qui supprime les 42 régimes de retraite, dont la branche retraite de la Sécu qui en représente près de la moitié, se poursuivent. Voir notamment Résistance Sociale d’octobre
https://www.resistancesociale.fr/IMG/pdf/Bulletin_RESO_octobre_2018.pdf
- La nocivité de cette réforme destinée à baisser de 25 % ou plus les pensions est très largement partagée. Le gouvernement réaffirme sans cesse que son principe n’est pas négociable.
Les dernières infos prouvent que la réversion n’existera pratiquement plus.
- Macron joue la montre jusqu’aux européennes et utilisera ensuite la procédure accélérée pour faire voter la réforme en juillet, sauf s’il prend peur pour les municipales.

Ne tombons pas dans le piège. Macron est mal à l’aise, a peur du mouvement social, de la sanction des urnes. Il attend une « fenêtre de tir » pour imposer sa réforme.

Il n’est que temps de mobiliser le plus largement et le plus unitairement possible pour obtenir l’abandon de la réforme. Ce qui fut obtenu de Nicolas Sarkozy peut et doit l’être d’Emmanuel Macron.