Journal REsistance SOciale n° 146
Mars 2016
Mis en ligne le 31 mars 2016

Au sommaire ce mois-ci :

p.1 et 2 : L’édito / p.2 : Solidarité internationale (Primaires américaines : le retour du social ? / Paris, Bamako, Tunis, Istanbul, Bruxelles, Lahore : même horreur, même solidarité, même combat !) / p.3 à 6 : Place au débat (Retrait en bloc de la loi Travail !) / p.7 : Actualité sociale (Projet de loi Travail (dite « El Khomri ») : un vent de mobilisation ! / Les hospitaliers dans la rue !) / p.8 : Coup de gueule (Trop de fonctionnaires, vraiment ?)

L’édito de Marinette Bache

Il y a cent quarante-cinq ans, le 18 mars 1871, naissait la Commune de Paris, à la suite du refus des Parisiens de Montmartre de rendre à Thiers les 144 canons mis à l’abri des Prussiens pendant le siège de Paris. Cette période de près de trois mois, qui devait se terminer dans un affreux bain de sang, notamment pendant la semaine sanglante (21-28 mai), vit éclore de nombreuses mesures, comme la mise en place d’une scolarité laïque, gratuite et obligatoire, l’éducation des filles, la création des premières associations ouvrières, la suppression du travail de nuit pour les boulangers, la réquisition des logements vacants, l’instauration d’une pension de réversion pour les veuves, la séparation de l’Eglise et de l’Etat…

Ces mesures ne survivront pas pour la plupart aux 72 journées révolutionnaires. Mais, malgré son échec immédiat, la Commune de Paris a laissé une telle trace dans l’imagination populaire que son action aboutira plus tard, grâce à la ténacité des radicaux socialistes puis des socialistes et des communistes, ainsi que des syndicats comme la CGT. 145 ans plus tard, on ne peut qu’être frappé de constater que ce sont certains de ceux qui osent se réclamer de Jaurès, comme le premier ministre Valls, qui défendent, à travers la loi travail, un projet rétrograde et libéral que n’aurait sans doute pas désavoué Adolphe Thiers. On comprend, dans ces conditions, que les électeurs de gauche soient déboussolés et se réfugient massivement dans l’abstention, lors des élections, laissant ainsi le champ libre au Front national. Pourtant, l’existence même de la Commune prouve que lorsque le peuple se révolte et prend son destin en mains, le cours des choses peut changer. C’est ce qu’on peut espérer des manifestations lycéennes, étudiantes et syndicales contre la loi Travail. Les premières manifestations ont permis quelques reculs, même si, comme nous le montre Jean-Claude Chailley dans son article, l’essentiel du texte n’a pas été modifié. Un texte qui allait même, à l’origine, jusqu’à réduire le nombre de jours de congés accordés à un salarié lors du décès d’un proche ! Comme pour le CPE, on peut espérer qu’au final le gouvernement sera dans l’obligation de retirer son texte.

Nous le disions déjà, lors de l’élection de François Hollande, c’est souvent le mouvement social qui a permis les grandes conquêtes ouvrières. Nous ne pensions cependant pas alors devoir nous battre pour préserver celles-ci. Certes, on n’en est pas encore au contrat de travail zéro heure instauré en Grande Bretagne, mais on pourrait bien y arriver si on accepte les nouveaux reculs, après l’ANI, la première loi Macron, le CICE… Tout un édifice censé favoriser l’emploi mais qui aboutit à toujours plus de chômage, de précarité et toujours moins de droits pour les salariés. (...)

Pourtant, la gauche, la vraie, ne manque pas de propositions capables de redonner à l’économie française le dynamisme dont elle a besoin, sans qu’il soit nécessaire de toucher au Code du travail ni de précariser davantage l’ensemble de nos compatriotes. Un comble quand on sait que la France est l’un des pays qui offrent le plus de dividendes aux actionnaires des entreprises. Tout cela au nom de l’Europe, qui apparaît de moins en moins comme une Europe sociale que nous vantaient encore certains, lors des dernières élections européennes. Cette construction européenne libérale que rejettent de plus en plus massivement les peuples européens. Encore faut-il que ce rejet puisse trouver un écho parmi les forces progressistes.

De ce point de vue, la rencontre de différents responsables européens, qui s’est tenue ces derniers jours aux côtés d’Alexis Tsipras à Athènes, est un encouragement. Les choses bougent petit à petit. Les élections en Espagne et au Portugal, la victoire de Corbyn au Labour vont aussi dans ce sens, même si, parallèlement, les partis xénophobes étendent leur emprise dans les pays d’Europe centrale.

En France, l’élection présidentielle commence à occuper les têtes même si ce n’est que dans un peu plus d’un an. Les pré-candidats se bousculent à droite, n’hésitant pas à tirer sur leur cible préférée : les fonctionnaires. A gauche, certains tentent de mettre sur pied une primaire, censée permettre de n’avoir qu’un seul candidat au premier tour. Initiative louable si elle se fait sur un vrai programme de gauche, rejetant clairement toute politique « austéritaire ». Mais d’ici 2017 est-il possible de retrouver la confiance des électeurs ?

A Résistance Sociale, nous nous attellerons prioritairement à élaborer un projet et une méthode permettant, à travers un rassemblement des républicains de gauche, défendant à la fois une laïcité intransigeante et la République Sociale chère à Jaurès, de participer à la reconstruction de la gauche.

Nous serons amenés dans les prochaines semaines et les prochains mois à faire des propositions.

En attendant, plus que jamais « Non à la loi Travail ! ».